Le marché de l'or est en ébullition après la décision du Royaume-Uni de quitter l'Union européenne.

Le prix de l'once a bondi de près de 8 %, soit plus de 100 dollars, peu après l'ouverture, vendredi, à Londres. Le métal n'avait pas enregistré une telle hausse en séance depuis la débâcle financière mondiale à l'automne 2008.

L'or a ainsi touché 1.360 dollars, son plus haut niveau depuis juillet 2014. En fin de journée, il gagne encore 4,5 % à plus de 1.315 euros.

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Et l'ascension du métal précieux n'est probablement pas finie. Les nombreux analystes qui ont travaillé sur l'éventualité d'un « Brexit » ces dernières semaines s'accordent à dire que l'or peut atteindre les 1.400 dollars l'once rapidement.

« L'argument en faveur d'un rallye de l'or est simple. L'incertitude favorisée par ce vote va entraîner suffisamment d'achats d'or pour faire monter les prix. Le lien, c'est l'interconnection entre l'or et les marchés financiers. Dans les périodes de doute, l'or est souvent l'un des rares actifs liquides perçus comme un « refuge ». Il est aussi historiquement négativ ement corrélé aux actifs risqués », explique James Steel, spécialiste des marchés des métaux précieux chez HSBC.

En livres sterling, l'or au plus haut depuis 3 ans

La seule chose qui retient l'or de progresser davantage, estiment les analystes de Commerzbank, c'est la fermeté du dollar, monnaie dans laquelle le métal est libellée. Le billet vert s'est apprécié de près de 5 % par rapport à l'euro.

A l'inverse, en euros, l'or a gagné jusqu'à 13 % vendredi, à 1.245 euros, à un pic depuis plus de trois ans. Toutefois, l'évolution la plus marquante reste encore celle de l'or en livres sterling, la devise britannique ayant plongé à un niveau sans précédent depuis 30 ans . Conséquence, l'once en livres est aujourd'hui à un sommet depuis 2013, à 1.000 livres.

« Passé la première réaction, la situation devrait se calmer progressivement, mais la question du « Brexit » promet de préoccuper les marchés pour un certain temps. Après tout, certains se demandent déjà quel pays membre de l'UE sera le prochain à organiser un référendum », commente Commerzbank. Pour la banque allemande, « l'incertitude quant à ce qu'il adviendra sur le plan politique devrait offrir un solide soutien à l'or au cours des mois à venir. »

Au Royaume-Uni, c'est la ruée vers les négociants d'or

Les investisseurs institutionnels se jettent aussi sur les ETF, ces fonds indiciels adossés à l'or physique. La société britannique Source, spécialiste de ces produits, révèle qu'au cours des trois premières heures de cotation, vendredi, les ETC sur l'or ont connu des volumes de transaction dix fois supérieurs à la moyenne de long terme.

Les particuliers ne sont pas en reste. Des Britanniques se sont précipités auprès de négociants d'or pour acheter des lingots et des pièces de métal précieux, rapporte Reuters. « Des files d'attente se forment déjà », note Tony Dobra, directeur exécutif de Baird & Co, qui possède un magasin dans le quartier londonien de Hatton Garden.

Même constat ailleurs en Europe : Mark O'Byrne, directeur des recherches de la firme Goldcore, un négociant installé à Dublin, confirme en parlant d'un montant record d'achats de métal précieux via internet.

The Royal Mint, qui frappe la monnaie britannique et produit des pièces et médailles commémoratives, indique de son côté que le trafic sur sa plateforme de vente de lingots d'or en ligne a augmenté de 550% et que l'ouverture de nouveaux comptes a triplé.

En une nuit électorale et une matinée, le site BullionVault a vendu pour sa part autant d'or et d'argent qu'en deux semaines de négoce normal en 2015.

Face à cette demande galopante, la compagnie Sharps Pixley a dû rapatrier en urgence des stocks détenus dans ses filiales allemandes et suisses. « L'or démontre ce qu'il fait de mieux : servir de valeur refuge », résume son directeur général, Ross Norman.

(avec Reuters)