• L'érosion attaque la côte ivoirienne, le patrimoine menacé d'un désastre

    L'érosion attaque la côte ivoirienne, le patrimoine menacé d'un désastre

    GRAND-BASSAM - Un désastre, soupire un patron d'hôtel en regardant les vagues.

    Ville historique et balnéaire, Grand-Bassam est menacée par l'érosion qui attaque la côte ivoirienne, alors qu'elle cherche à se faire inscrire au patrimoine mondial de l'Unesco.

    La mer s'est déchaînée un soir, emportant tout sur son passage, raconte à l'AFP Edouard Blanckson, propriétaire du site hôtelier le Parrain, situé en bord de mer dans cette ex-capitale du temps de la colonisation française, à 40 km à l'est d'Abidjan.

    Au total, des dizaines de constructions, restaurants et autres maquis (gargotes) ont subi de gros dégâts ces dernières années du fait de l'érosion. Pour l'heure, des digues de sable jetées sur la plage servent de modeste rempart contre les flots.

    Si rien n'est fait d'ici une vingtaine d'années, le front de mer à Grand-Bassam sera sous les eaux, avertit Philibert Koffi Koffi, du Centre de recherches océanologiques (CRO) d'Abidjan.

    L'érosion côtière est un phénomène normal, mais elle s'est amplifiée cette dernière décennie à cause du changement climatique et de la montée du niveau marin, explique l'océanologue.

    Selon lui, 150 kilomètres, sur les 500 du littoral ivoirien, sont rongés jour après jour.

    • Or, Grand-Bassam n'est pas une ville ordinaire en Côte d'Ivoire. Elle est l'une des destinations les plus prisées des Abidjanais plus ou moins fortunés le week-end, comme des visiteurs étrangers.

     

    • Et les agréables plages ne sont pas tout ce qui les attire. La cité recèle les plus beaux et nombreux vestiges d'architecture coloniale du pays.

     

    • Dans le quartier France, des bâtiments comme le palais de justice, édifié en 1893, dévorés non encore par les vagues mais par l'humidité combinée au manque d'entretien, offrent le spectacle d'une splendeur évanouie.


    Après un échec en 2009, les autorités ivoiriennes en place depuis un peu plus d'un an tentent donc à nouveau de faire inscrire ce joyau en péril au patrimoine de l'Unesco, une reconnaissance espérée pour le pays après la crise politico-militaire meurtrière de 2010-2011.

    Mais cela donnerait de nouvelles obligations en matière d'urbanisme et d'environnement, souligne le ministre de la Culture Maurice Bandama, avant le prochain rendez-vous à l'Unesco courant juin à Saint-Pétersbourg (Russie).

    Vieille ville sous les eaux

    Si cette année la mer a avancé de plus de cinq mètres à Grand-Bassam, le réchauffement n'est pas seul en cause:

    • c'est aussi que le sable est enlevé sur la plage par les habitants pour construire des maisons.
    • C'est fini, c'est interdit!, prévenait-il en mai, venu sur place obtenir la bénédiction du roi Awoula Amon Tanoé, chef communautaire incontournable, pour la bataille de l'Unesco.


    Et l'érosion n'est pas sans effet sur l'économie: le projet d'autoroute reliant Abidjan et Grand-Bassam a dû être suspendu.

    • A une centaine de kilomètres à l'ouest, l'ancien comptoir colonial de Grand-Lahou montre jusqu'où les ravages peuvent aller. Les deux tiers de la ville ont été engloutis par la mer.


    Bâtie sur une mince bande de terre entre océan Atlantique et lagune, la cité a perdu ses grands commerces, son marché, sa scierie, tous submergés par les flots. Les vieilles bâtisses encore debout sont envahies d'herbes sauvages. Ici ou là, un bout de mur sortant de l'eau complète ce sombre tableau.

    J'ai été surpris une nuit par les vagues, se rappelle un habitant, Dominique Sédji, montrant des gravats sur lesquels se brisent des vaguelettes. J'ai eu seulement le temps d'évacuer ma petite famille puis les yeux pour constater les dégâts, dit-il avec émotion.

    Grand-Lahou s'est recréée plus à l'intérieur, au sec. Mais pour ce qui reste de la vieille ville, ce morceau d'histoire, le temps est compté.

    Il faut sauver ce site, dont la disparition va entraîner celle de nombreux villages environnants, supplie le chef local Vincent Ledjou, dans son élégant pagne traditionnel, disant lancer un cri du coeur à l'Etat.

    Pour les experts du CRO, un plan de gestion durable s'impose d'urgence pour prendre à bras-le-corps le problème de l'érosion côtière et intégrer toutes ses données (tourisme, économie, environnement...).

    A Grand-Bassam, Edouard Blanckson, quant à lui, rêve au moins de digues de protection marine formés de blocs granitiques. Il y a des pays qui ont construit des digues en béton armé...


    (©AFP / 17 juin 2012 06h17)


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